“Let us step into the night and pursue that flighty temptress, adventure.” ft. Elkan

Elle savait qu’elle n’aurait pas dû se trouver là. Si Elkan l’apprenait, elle n’était pas certaine de la manière dont il réagirait. Elle savait que ce n’était pas raisonnable. Que ça lui faisait du mal. Mais elle ne pouvait pas s’en empêcher, maintenant qu’elle l’avait retrouvé. Des questions demeuraient en suspend cependant: comment se faisait-il qu’il se soit trouver si près sans qu’elle le sache ? Et surtout qu’il se soit remis en couple si vite avec quelqu’un d’autre ? Il ne portait même plus son alliance… Elle les avait espionnés de l’extérieur, et elle avait appris que sa nouvelle petite amie était barmaid et travaillait le soir, ce qui l’arrangeait bien. Elle s’arrangeait pour ne jamais la croiser. Ca faisait beaucoup trop mal. D’ailleurs qu’est-ce qu’il pouvait bien lui trouver ? Elle ressemblait à une poupée Barbie orange, elle n’était absolument pas son genre ! Elle n’arrivait qu’une fois que l’intruse était partie, et qu’il était seul. Et elle entrait chez lui, le regardait pendant qu’il visionnait une émission de télé, lisait, dormait. Elle faisait comme si rien n’avait changé. Au début, elle restait dans un coin, ne touchait à rien. Puis, elle s’était mise à ranger ce qui trainait, réorganiser certaines choses. Le seul endroit où elle n’arrivait pas à entrer, c’était la chambre à coucher.

Mais il lui en fallait plus. Elle ne pouvait ni le toucher, ni lui parler. Etre condamnée à l’invisibilité face à l’homme qu’elle aimait devenait insupportable. Elle l’avait regardé partir dans la salle de bain pour se changer, se brosser les dents avant d’aller se coucher. C’est là qu’elle vit la montre, celle qu’elle lui avait offerte pour leur anniversaire de mariage. Elle la prit, mais son coude vint heurter la bombe de mousse à raser qui tomba avec fracas sur le sol. Elle l’entendit revenir sur ses pas. Sans prendre le temps de réfléchir, elle mit la montre dans sa poche et disparut.

En un instant à peine, elle se retrouva à l’accueil de l’agence, en sécurité. Elle se sentait essoufflée, mais n’eut pas le temps de se remettre de ses émotions. Elle entendit la sonnerie du téléphone venant du bureau d’Elkan. Elle savait parfaitement qu’il travaillait à l’extérieur, elle évitait de se rendre chez Sam lorsqu’il était sans les parages afin qu’il ne s’aperçoive pas de ses absences. Elle se matérialisa dans le bureau et décrocha le combiné.

C’était le géant blond lui même, qui lui demandait son aide, et de le retrouver au plus vite dans une rue non loin des entrepôts désaffectés dans le 7eme arrondissement. Il ne précisa pas les détails, mais elle accepta sans hésitation. Une telle distraction était la bienvenue, au moins elle éviterait de trop réfléchir pendant ce temps. Elle raccrocha et sortit la montre de sa poche. L’inscription qu’elle avait fait graver était toujours là. Elle n’arrivait pas à croire qu’il l’ait vraiment conservée et elle se surprit à éprouver un espoir idiot et vain, qu’elle étouffa presque aussitôt. Sous le coup d’une impulsion elle enfila la montre à son poignet avant de partir rejoindre le sorcier.


Arriver à l’endroit indiqué ne fut pas long, il faut dire que depuis qu’elle était morte ses temps de transport avaient considérablement raccourci. Il faisait nuit noire et elle avait beau regarder autour d’elle, elle ne voyait pas Elkan. L’endroit était loin d’être rassurant. Il était pratiquement désert, à l’exception de quelques types à l’air plutôt louche. Elle avait beau se savoir invisible à leurs yeux, elle n’avait pas spécialement envie de trainer longtemps ici toute seule. C’est alors qu’elle sentit une main se poser sur son épaule, et sursauta violemment.

 

Les planques? Pas trop son dada. Il s'emmerde pendant des heures, perd un temps précieux à espionner des personnes aux vies aussi palpitante qu'une moule sur son rocher. Et encore, Elkan s'était surpris à être passionné par le reportage sur les moules. Depuis, étrangement, il a cessé d'en manger d'ailleurs. En tout cas, cette fois-là ne déroge pas à la règle. Le nécromancien s'emmerde royalement, installé dans son auto à attendre avec un appareil photo dans les mains. Pourquoi s'est pas Jude qui s'y colle déjà? Le nécromant espère vraiment que Jude est sur une affaire et pas sur une affaire de baise.

Le géant blond peigne ses cheveux lorsqu'il voit sa cible quitter l'immeuble avec un colis à la main. Avec un peu de chance, Elkan allait enfin avoir des éléments de réponses pour son enquête. Patient, il attend que l'homme démarre son auto avant de le suivre. Toujours laisser une bonne distance avec le véhicule suivi mais pas trop non plus. Ce serait con de le perdre de vue après avoir poireauté pendant des heures. D'ailleurs il a une putain d'envie d'uriner.

Après un trajet d'une vingtaine de minutes, Elkan dû se garer près des entrepôts désaffectés, sur le septième arrondissement. Il coupe le moteur et peste de voir aussi mal dans le noir. Il aimerait bien avoir des supers pouvoirs lui permettant de scruter l'obscurité avec aisance. Il peut néanmoins distinguer sa cible. Un homme presque aussi grand que lui mais aussi baraqué que Basile. Une tignasse rousse vive sur le dessus de son crâne et des tatouages sur les bras. Certains lui colleraient l'étiquette "bicker" sur son front. Elkan celui de "trafiquant d'artefact". Toujours dans sa voiture, le nécromancien s'arme de son téléphone portable et appelle l'agence. Il croise les doigts de pieds pour tomber sur la belle et magnifique Coraline. Bingo. Plusieurs sonneries plus tard il entend la voix mélodieuse de la fantôme. Pas de temps à perdre, toutefois, il lui donne une adresse lui demandant devenir dans l'immédiat. Il raccroche mais garde son téléphone en main lorsqu'il quitte son auto.

Un coup d’œil aux alentours et il voit apparaître la silhouette de Coraline. Elle est tel un mirage, une apparition des plus merveilleuses. Il rêvasse une fraction de secondes avant de secouer la tête comme si ça permettait de remettre ses idées au clair. La mission! Il doit se recentrer. A grandes enjambées, il rejoint la fantôme et pose une main sur son épaule. La pauvre. Le bond qu'elle fit surpris Elkan qui eu un sursaut à son tour. Néanmoins, il affiche aussitôt un sourire charmeur lorsqu'il s'adresse à elle.

— Ce n'est que moi.

Le détective parle à voix basse car même si ils sont éloignés de sa cible et du groupe d'hommes qu'il a rejoint, il veut être certain de ne pas attirer l'attention sur lui. Pour cela, il colle son téléphone à sa joue. Si jamais on le voit parler dans le vide, ça va paraître louche alors qu'avec un téléphone, personne ne remarquera rien.

— Tu vois le groupe d'homme là-bas? L'un d'eux détient un artefact dangereux qu'il est en train de revendre. Je veux que tu ailles les rejoindre pour les écouter. Mémorise le plus d'informations possible.

La mission paraît simple mais le détective peut comprendre si Coraline éprouve de l'anxiété. Il a l'impression de la jeter droit dans la gueule du loup, comme ça, sans aucun préambule. Bien que ça ne lui plaise pas des masses, il doit obtenir ces informations coûte que coûte.

— Ça va aller? Tu t'en sens capable?

De toute façon, c'est pas comme si elle n'avait pas l'habitude d'espionner les gens. Hein.

 

Elle avait beau savoir qu’elle ne risquait pas grand chose, sentir une paluche s’abattre sur son épaule au beau milieu de la nuit n’était pas très rassurant. Elle se retourna vivement et poussa un soupir de soulagement lorsqu’elle se trouva face à la silhouette d’Elkan. Elle se sentit soudain moins vulnérable aux côté de cette présence familière et posa instinctivement sa main sur le bras du viking.

« Tu m’as fait peur ! »

Elle eut un sourire soulagé avant de laisser retomber sa main. Son soulagement laissa place à la curiosité et elle se demanda une nouvelle fois pourquoi il l’avait fait venir ici à une heure pareille. Elle n’eut pas besoin de le lui demander, il lui fournit les explications lui-même, son portable plaqué contre sa joue pour ne pas attirer l’attention. Elle se retourna pour les regarder. Ils étaient la définition même de louches, le genre de types face auxquels de son vivant elle aurait changé de trottoir. La mission était plutôt simple: s’approcher, écouter, mémoriser. Ces derniers mois, elle s’était peu à peu habituée à sa condition et ses peurs s’étaient atténuées. Ou du moins, elles n’étaient plus les mêmes. Lorsqu’il lui demanda si elle s’en sentait capable, elle ne put s’empêcher de se sentir légèrement vexée et ne comprit pas que c’était pour sa sécurité qu’il s’en faisait.

« Evidemment, ça n’est pas difficile, je peux encore mémoriser quelques phrases. »

Elle partit donc et marcha en direction des hommes, prenant bien soin de rester la plus silencieuse possible. Elle avait beau être invisible, ces gars là se méfieraient, le moindre bruit risquait de les alerter et d’interrompre une possible transaction. Alors qu’elle s’approchait, elle commençait à entendre plus distinctement leurs voix. De ce qu’elle comprenait, ils débattaient de prix, et ça semblait s’élever en milliers de francs. C’est alors qu’elle passait juste devant eux que l’un des types hurla bien plus fort.

« Hey, toi ! Qu’est-ce que tu fous ? »

Il lui fallut quelques instants pour prendre conscience que c’était elle qu’on pointait du doigt. Elle eut le réflexe idiot de regarder derrière elle pour s’en assurer. Merde merde merde.

« Euh… je passais par là… »

C’est tout ce qu’elle trouva à dire, mais visiblement on ne l’écoutait pas. Elle maudit Elkan: il n’avait pas pu vérifier que ces types n’étaient pas humains avant de l’envoyer au casse-pipe ??

« Elle nous écoutait ! »

Elle n’eut même pas l’occasion de protester. L’un des types l’attrapa par le bras, malgré ses protestations, puis ses insultes. Elle devait réfléchir vite, et elle avait plusieurs options qui s’offraient à elle: Elle pouvait attraper le colis et partir en courant mais c’était trop risqué. Elle pouvait se téléporter jusqu’à Elkan et fuir avec lui, mais là encore c’était risqué et ils auraient fait tout ça pour rien. En revanche, si elle se laissait attraper, elle aurait l’occasion de tout entendre et pourrait même peut-être ramener l’artefact si elle s’y prenait bien. Ces types ne savaient visiblement pas qu’ils ne pouvaient pas la blesser.

« Désolée ma jolie, on va pas te laisser repartir, tu viens avec nous, et tu vas nous dire qui t’envoie ! »

Tout en criant et en faisant mine de se débattre, elle trouva le moyen de faire un pouce en l’air discret en direction du sorcier dans le dos de l’un de ses ravisseurs. Ceux-ci la maintinrent plus fermement. Lorsqu’elle vit qu’ils semblaient se diriger vers l’intérieur de l’un des entrepôts, elle se demanda si ce qu’elle était en train de faire état une si bonne idée que ça…
 

L'incompréhension s'imprime immédiatement sur la face du nécromancien. Quoi? Pourquoi? Comment? Il n'a jamais mis en doute son intelligence. Si elle n'était pas morte, il la soupçonnerait d'avoir ses règles. Alors il ouvre la bouche pour démentir mais là voilà qui part déjà à l'aventure. Dans un sens, tant mieux, elle n'est pas du genre à perdre inutilement du temps. Une qualité qu'apprécie énormément Elkan car il est le premier à affirmer que le temps, c'est de l'argent. Et l'argent, ça, Elkan aime passionnément.

Avec moins de passion mais d'avantages de concentration, il observe l'avancée du fantôme. Si au début le plan semble fonctionner les choses se compliquent très rapidement. Un merde silencieux franchit les lèvres du nécromancien quand un des balourds attrape le bras de Coraline. Non seulement ce n'était pas prévu mais ça fout le sorcier en rogne. Coraline, pas touche. Et c'est autant valable pour Jude que pour les brutes épaisses de ce soir.

La colère autant que l'inquiétude se jouent à l'intérieur d'Elkan, tel un orchestre qui se met en branle et qui n'en finit pas de monter crescendo. Et son cerveau, le chef d'orchestre, s'active et se démène. Il doit trouver un plan et vite. En dépit du pouce en l'air de la fantôme, la situation n'est pas okay. Il déteste perdre le contrôle. Tout en réfléchissant, il se frotte le menton et marmonne.  

— Pas le temps de réfléchir, qu'il décide en ouvrant le coffre de sa voiture.

On pourrait croire qu'il va s'armer d'armes à feu, mais non, rien de tout cela. Le nécromancien s'équipe d'herbes magiques et de quelques objets occultes fourrés dans son sac de sport. Pour retrouver Coraline ce n'est pas bien difficile. Suffit de suivre les cris mais de toute les manières possible, il a vu dans quel entrepôt elle a été amenée. Alors il se la joue espion en infiltration. Jambes à moitié fléchit quand il marche, dos courbé, il tente d'être le plus silencieux possible.

— Attache-la solidement à la chaise.

La voix est autoritaire mais surtout malsaine. Une certaine forme de jubilation à l'idée même de s'offrir une séance d'interrogatoire. Elkan serre des dents et ravale son envie de tout défoncer. Au lieu de ça, il s'infiltre à l'intérieur de l'entrepôt et se cache derrière un amas de caisses en tout genre.

Contre tout attente et au pire moment, Bernard apparaît, toujours aussi peu vêtu et inconscient de la situation qui se joue. Elkan affiche de grands yeux ahuris et l'adrénaline monte en flèche, s'infiltrant dans tout son corps.

— Hey, vous m'voyez? On est où là?
— Bernard c'est pas le moment, que tu chuchotes.

Mais c'est trop tard. Tu n'entends plus aucun bruit aux alentours.

— Vous connaissez mon prénom? On s'est déjà vu alors? Et pourquoi vous chuchotez?

Conscient d'être repéré, il ignore Bernard et sort de sa cachette.

— CORALINE, VAS T'EN, qu'aboie le sorcier.

Qu'elle se pop-up ailleurs. Aussi loin que possible. Mieux, dans la voiture. Elkan ne se fera pas prier pour la rejoindre dès qu'il aura volé l'artefact.
 

Sur le coup, elle était persuadée d’avoir eu une idée de génie. Les deux types qui la tenaient la traînèrent jusqu’à l’intérieur d’un entrepôt désert et particulièrement glauque, puis la soulevèrent littéralement jusqu’à la forcer à s’asseoir sur une chaise, la maintenant le temps de la ligoter. Durant tout ce temps, elle ne cessait de crier et de se débattre. Il fallait qu’ils y croient. Tant qu’ils la pensaient humaine, elle n’était pas en danger, et elle avait le loisir de guetter le bon moment pour fuir avec le mystérieux colis, en espérant que c’était bien là l’artefact qu’ils cherchaient. Bon, elle devait l’admettre, elle n’était pas complètement rassurée non plus. Elle s’était mise volontairement en danger, elle n’était même pas sûre qu’Elkan ait vu où elle se trouvait. Les types la regardaient, à la fois furieux et avec un air de satisfaction sadique.

« Tu vas nous dire ce que tu faisais ici. Qui t’envoie ? »

Bon il s’agissait de gagner du temps. Et de ne pas se laisser impressionner, tout en n’ayant pas l’air trop sûre d’elle, au risque d’attirer leurs soupçons.

« Mais personne ! Je vous l’ai dit, je passais par là et je… »

Elle crut un instant que l’un d’eux allait la frapper et eut le réflexe de fermer les yeux et de baisser la tête. Mais il retint son geste. Ils avaient apparemment entendu un bruit venant d’un coin de l’entrepôt. Pas besoin d’avoir inventé l’eau chaude pour deviner qu’il s’agissait d’Elkan. Aussitôt le sang de la fantôme se glaça, enfin façon de parler. Si elle ne risquait rien, il n’en allait pas de même pour le sorcier, et la dernière chose qu’elle voulait, c’était le mettre en danger. Il lui hurla de fuir. Et elle fut tentée d’obéir. Elle le regarda, puis regarda le carton. C’était trop bête de fuir maintenant, alors qu’il était si proche. Cela lui prendrait à peine un instant. Elle disparut, ce qui lui permit de se défaire de ses liens et réapparut juste derrière l’homme qui tenait la boite en question. Elle voulut profiter de la confusion générale pour se jeter sur lui et la récupérer, mais au moment où elle s’élança, quelque chose attrapa ses chevilles et la fit tomber. Elle eut à peine le temps de voir de qui il s’agissait. Apparemment l’un des types avait… des tentacules ? Voilà qu’il la trainait sur le sol. Et elle avait beau essayer, impossible de disparaitre.

« Je ne sais pas ce que tu es ma jolie, mais hors de question que tu partes comme ça. »

Elle regarda partout autour d’elle pour voir ce qui pouvait l’aider et avisa la chaise sur laquelle elle avait été attachée quelques minutes auparavant. Il lui fallut une bonne dose de concentration pour pouvoir la propulser sur son assaillant. Elle visa moins bien que ce qu’elle avait espéré, mais parvint à le déstabiliser suffisamment pour lui faire relâcher son emprise et pouvoir se libérer. Elle se leva et s’éloigna le plus vite possible, regardant partout, à la recherche du sorcier.

« ELKAN ? »

Elle voulait avant tout être certaine qu’il allait bien. Et repérer où se trouvait à présent leur précieux colis. Et puis filer, bien évidemment, et le plus vite possible.
 

Fais chier. Fais chier. Fais chier. Il se répète ça en boucle, incapable de réfléchir. D'ordinaire, il envoie Roxane pour les missions suicides du genre. Lui son truc, c'est de relever les morts, lancer quelques sorts. Le terrain, il le réserve pour les autres parce qu'avec ses costumes à plus de deux milles francs y'a intérêt à rester loin de la crasse et des éclaboussures de sang. Sauf que du coup il est peu habitué à gérer des situations de crise comme celle-ci. Un vrai bureaucrate. Et bordel que ça l'emmerde de réaliser ça, lui qui se veut mâle alpha de l'agence. Il ordonne à Coraline de fuir et quitte sa cachette puisque de toute façon il a été repéré. Merci Bernard. Le nécromancien suppose que la fantôme de risque rien... Sauf qu'il était persuadé, quelques minutes auparavant, qu'ils étaient tous humain. Alors il préfère ne courir aucun risque et éloigner la fantôme loin de là. Est-ce qu'elle va obéir? Dans la mesure où c'est une femme... la réponse est non. Elles adorent le contrarier.

Une créature aussi grand que lui déboule. Non seulement il est grand mais aussi très carré. Sa peau arbore une immonde couleur jaune quant à son crâne il est envahit de crête. Le nécromancien n'est pas certain mais les crêtes ont l'air d'être faite d'os. Son instinct lui hurle de courir loin. Très loin. Mais d'un autre côté il va avoir l'air de quoi si Coraline le voit prendre la fuite comme un lâche? Sauf qu'à mesure que la chose approche, les jambes d'Elkan décident de lui désobéir et le voilà qui tourne les talons pour courir loin. Dommage pour lui, il s'est décidé trop tard et la chose l'attrape par le col, le tirant vivement vers l'arrière. Le choc est violent et le col en question lui rentre dans la gorge, lui coupant momentanément le souffre. Il se sent également chuter en arrière et la collision entre son dos et le sol n'est pas des plus agréables. Bordel! Son costume est bon pour partir au pressing!

— AU SECOURS! DES VANDALES!

A défaut de voir Bernard, il l'entend hurler dans tout l'entrepôt. Le vieillard est présentement en train de courir, coursé par un des "vandales". Si la situation n'était pas aussi critique, Elkan en rigolerait bien. Le nécromancien commence à peine à se remettre du choc que deux paluches jaunes et griffues l'attrape et le redresse sur ses pieds. Il se sent comme un pantin qu'on manipule avec aisance. Une situation désagréable et inconfortable.

— Qui t'es, toi? grogne le monstre.

Putain l'haleine. Une infection. Le nécromancien détourne la tête et refoule plusieurs haut le cœur. Pourtant, les mauvaises odeurs il connait. Il relève régulièrement des cadavres. On lui pose une question mais on ne lui laisse pas l'occasion de répondre qu'on l'assène déjà d'un coup de genoux dans l'estomac. Il se plie en deux et prend conscience que le monstre l'a relâché. Dans le même temps, Coraline hurle son prénom ce qui semble interpeller le démon. Elkan profite de ce court moment de confusion pour choper une fiole en verre présente dans son sac et le balancer dans la gueule du monstre jaune. Surpris, la créature recule et crachouille les éclats de verre qui se sont faufilés dans sa gueule. Surement s'attendait-il à de l'acide ou quelque chose de semblable puisqu'en comprenant qu'il ne se passait rien il se mit à rire. Un rire moqueur et mauvais qui signifie clairement : je vais te buter.

— De l'eau?!

Elkan affiche un sourire en coin, déjà satisffait.

— Pas exactement.

Il ponctue sa phrase d'un clin d'oeil et recule vivement alors que la créature, elle, s'approchait promptement.

— Incendium!

Le liquide s'enflamme instantanément transformant la créature en torche vivante. Sans perdre de temps, Elkan court très loin pour ne pas lui aussi finir carbonisé. Ses claires prunelles cherchent désespérément la fantôme et lorsqu'enfin il la retrouve, il sent un poids un moins dans sa poitrine. Il la saisit par les épaules, ignorant les décharges électriques qui se glissent sous son derme.

— Tu as vu le colis? questionne le nécromancien alors qu'une odeur de brûlé se dégage de plus en plus.

Une des caisses semble avoir pris feu et le nécromancien constate qu'un incendie se déclare et se propage. Hum. Celle-là il ne l'avait pas prévu. Ils ne doivent pas traîner et visiblement l'homme au colis s'est tiré.

 

Le chaos le plus total régnait dans l’entrepôt et Coraline ignorait comment ils allaient bien pouvoir s’en sortir. Et surtout, où était Elkan. Elle n’était pas complètement dupe, le sorcier avait beau jouer les fiers, elle ne se souvenait pas l’avoir vu se battre une seule fois… Et on ne pouvait pas dire que niveau combat elle était au point. Ils étaient certainement le pire duo possible pour ce genre de mission. Son seul atout était le fait qu’elle soit déjà morte, mais ça risquait de ne pas les aider à récupérer le fameux colis. D’ailleurs la fantôme n’était toujours pas certaine de ce qu’il contenait, mais à en juger par l’empressement du géant blond à le récupérer, c’était quelque chose de particulièrement important.

Le temps qu’elle se dégage de l’emprise de son assaillant, celui qui détenait la précieuse marchandise avait pris la poudre d’escampette. Elle voulut le rattraper mais se retrouva bloquée par d’autres démons. Ou autres, elle ne savait pas vraiment ce qu’ils étaient. Elle regardait partout à la recherche d’Elkan, inquiète de ce qui lui était arrivé. Pourquoi avait-il fallu qu’il la suive ? C’était complètement stupide, et elle ne comprenait pas comment il s’était fait repérer si facilement. Lorsqu’elle aperçut sa silhouette, elle se sentit incroyablement soulagée. Pour un peu, elle l’aurait pris dans ses bras, mais ce n’était ni le lieu, ni le moment.

« Oui, un des types l’a emporté, il est parti par là. »

Elle pointa du doigt la sortie. Déjà, elle ne le voyait plus. Il fallait faire vite. L’odeur de brûler attira également son attention. Le feu risquait de se propager très rapidement, ça avait d’ailleurs déjà commencé. L’avantage était que leurs assaillants étaient trop occupés à s’en sortir également pour se soucier d’eux.

« Il faut qu’on sorte d’ici. Viens ! »

Sans réfléchir, elle le prit par la main et l’entraina jusqu’aux flammes. Puis, elle se concentra, tendant de frayer un passage jusqu’à la sortie. Maitriser un élément tel que le feu était bien moins évident que faire bouger des objets dans le vide, mais elle parvint tant bien que mal à créer une sorte de passage et poussa Elkan en avant, avant de traverser à son tour, en espérant que l’espace était suffisamment grand pour qu’il ne se brûle pas au passage.
Le pire semblait passé et la sortie était juste devant. Elle avait l’impression qu’elle allait s’effondrer d’une minute à l’autre, tellement elle avait la trouille. Une peur qu’elle devait étouffer pour conserver un minimum de sang froid.

« Je vais essayer de récupérer le colis. Dépêche toi de sortir. »

Les flammes s’étendaient plus rapidement qu’elle ne l’aurait cru. Elle disparut et réapparut un peu plus loin dans la rue. Elle balaya le lieu du regard avant d’apercevoir la fameuse silhouette qui s’éloignait en courant.

« Hey ! »

Elle se mit à courir derrière lui, puis se téléporta de nouveau jusqu’à l’endroit où il se situait. Sauf que… rien. Elle ne voyait plus personne, la rue était totalement déserte. Elle marcha, regardant tout autour d’elle, sans comprendre. S’était-il téléporté également ?

C’est alors qu’elle sentit quelque chose agripper ses cheveux et elle poussa un cri de stupeur. Le type la tira vers lui et la ceintura puis la souleva comme si elle avait été une brindille.

« T’es qui toi ? Qu’est-ce que tu veux ? »

Elle se débattait autant qu’elle pouvait. Il se servait de ses deux bras, il avait donc dû poser le colis quelque part.

« Lâche-moi ! »

Pourquoi ses pouvoirs ne marchaient jamais quand elle paniquait ? A la place, elle se mit à lui envoyer tous les coups de pieds qu’elle pouvait, en espérant toucher un endroit sensible. Apparemment, elle y parvint, puisqu’il poussa un puissant râle et la fit tomber par terre, en l’insultant copieusement.
 

L'entrepôt flambe avec une rapidité hallucinante. Coraline a raison, ils doivent sortir de là au plus vite. A dire vrai, c'est surtout Elkan qui doit se barrer au plus vite. Contrairement à Coraline il n'est pas déjà mort. C'est cependant un détail qu'il a oublié. Raison stupide pour laquelle il a volé à son secours. Raison stupide pour laquelle il tenait absolument à la retrouver avant de quitter les lieux. La fumée devient oppressante et la main de la fantôme contre la sienne lui fait l'effet d'un électrochoc. Pour autant il ne bronche pas... car trop occupé à tousser.

La fantôme désigne la sortie et y guide le nécromant. Toutefois un obstacle de flammes se dressait devant eux. Elle parvient à écarter les flammes pour lui ouvrir le passage. Impressionnant. Néanmoins la crainte de finir carbonisé ou d’abîmer définitivement son costard évince très vite son admiration. La fantôme le pousse devant et une fois le mur de feu passé, la voilà qu'elle disparaît presque aussitôt pour récupérer le colis. Il n'eut pas le temps de la remercier ou de lui dire d'être prudente. La manche de son costard contre son nez il poursuit sa route jusqu'à son échappatoire. Une fois hors d'atteinte des flammes, le sorcier respire à plein poumons et avise les alentours à la recherche de leur homme ou démon. Il ne sait plus trop mais dans l'immédiat ce n'est plus vraiment important. Dans l'immédiat, Elkan aurait aimé s'effondrer, étaler ses jambes sur son bureau et se boire un bon chocolat chaud. Au lieu de ça il se met à courir, à la recherche de Coraline et du colis. Il ne met guère longtemps à les trouver, certes, mais ce qu'il voit est loin de lui plaire. Coraline pourchasser une silhouette. D'une certaine manière, il admire la persévérance de la fantôme, d'un autre côté, il préfère l'idée de la savoir hors de danger. Voulant gagner en rapidité, du moins il le présume, Coraline se téléporte jusqu'à la fameuse silhouette. Sauf que l'homme disparaît lorsqu'elle apparaît. Qu'est-ce que... La situation dégénère. Vraiment. Et Elkan accélère la cadence... malheureusement trop tard. Lorsqu'il arrive à leur hauteur, la fantôme a le temps d'administrer un coup de pied magistral au malfrat. Même si ce n'est pas le moment, un petit relent de fierté s'esquisse sur le bord de ses lèvres.

— Bien joué.

Sauf qu'il a quelque chose a ajouté à cela. Même si le malfrat est déjà à terre à se tenir les coucougnettes, rendu k.o par la fantômette, ce n'est pas suffisant. On ne touche pas à Coraline. Surtout pas pour la malmener. Alors le géant blond forme un poing massif qu'il abat avec violence sur le visage du mécréant. C'est son côté coq de basse-cours qui ressort, il doit montrer son côté mâle alpha. C'est con, c'est vrai, mais y'a pas grand chose à faire. Ce qui est encore plus con c'est la douleur qui pulse dans ses doigts. Alors ouais, là le gars est à présent sonné, mais bordel il vient de se péter la main! C'est pas possible autrement. Elkan arbore ce petit sourire crispé, vous savez, celui qu'on se donne pour paraître cool alors qu'en vrai on a juste envie de chialer dans les jupons de sa mère. Et merde.

— Récupérons le colis.

C'est dingue comme sa voix monte légèrement dans aigu à cause de la douleur. Il balaie les alentours du regard, se demandant où peut se trouver ce putain de colis lorsqu'il remarque la voiture du gars. Si il a entreposé le colis, c'est forcément là. De sa main valide, le nécromancien fouille les poches de l'homme inconscient à la recherche d'un trousseau de clé... mais il ne trouve rien. Il inspire. Expire. Se redresse et verrouille son regard sur Coraline.

— Est-ce que tu peux te téléporter dans la voiture, là-bas?

Il désigne d'un mouvement de tête la fameuse bagnole en question. L'idée ne lui plait pas des masses. Depuis tout à l'heure la situation ne fait que se dégrader alors qu'à la base, c'était une mission toute simple. D'autant plus que l'entrepôt est en train de flamber et qu'il a intérêt à déguerpir rapidement!  

— Je te retrouve dans ma voiture. Avec le colis.

Enfin si elle le trouve. Il se pince les lèvres.

— Si le colis n'est pas dans la voiture, pas la peine d'insister. Tu me rejoins.

Il ne sait pas si d'autres colosses vont arriver. Il ne sait pas quand le colosse qu'ils ont mis à terre va s'éveiller. Ils ne savent pas grand chose finalement et ça agace le nécromancien. Y'a un truc qui cloche dans cette affaire. On lui a volontairement caché des éléments et franchement, ça le fout bien en rogne. Mais surtout, il n'a pas envie que ça se répercute sur la pauvre Coraline qui en a déjà bien bavé. Il tourne les talons et se dirige vers son auto en espérant y trouver la fantôme avec le colis.  

Elle se débattait comme une diablesse afin qu’il la lâche enfin. Un râle de douleur lui fit comprendre qu’elle avait tapé dans le mille, littéralement. Elle n’avait cependant pas prévu que lorsqu’il la lâcherait, il le ferait d’un coup et elle tomba lourdement sur le sol. C’est à ce moment qu’Elkan arriva, alors qu’elle se redressait, prête à se relever. C’est alors qu’elle le vit s’élancer et lever le poing vers l’individu.

« Elkan, n... »

Trop tard. Elle n’avait jamais vu le sorcier se battre et elle savait d’expérience que donner un coup de poing quand on ne savait pas le faire était rarement une bonne idée. Non pas qu’elle ait une quelconque expérience du combat, mais elle avait eu entre les mains de très nombreux types ayant voulu jouer les coqs de basse-cour lorsqu’elle travaillait à l’hôpital. D’ailleurs le sorcier ne la trompait absolument pas, elle devinait qu’il devait souffrir le martyr. Elle dut se retenir de sourire et évita de lui faire la moindre remarque; elle le connaissait suffisamment pour savoir qu’elle risquait d’attenter à sa précieuse virilité. Elle se contenta de hocher la tête en faisant son possible pour garder son sérieux. Elle se rappela leur mission et parvint à ne pas rire.

« Je suis certaine qu’il l’avait, il ne doit pas être loin. »

Elle était frustrée d’avoir fait !a pour rien, et pressée par le temps. Une mission qui semblait au départ si simple ne l’était en fait pas du tout, et elle voyait bien que le blond était préoccupé. Elle écouta ses instructions et hocha de nouveau la tête. Ce n’était pas compliqué, il lui faudrait à peine une seconde.

« D’accord, à tout de suite. »

Elle se téléporta immédiatement à l’intérieur de la voiture. Elle n’eut aucun mal à repérer le colis, qui était à l’arrière du véhicule. Elle l’attrapa et se téléporta de nouveau jusque dans la voiture d’Elkan. Facile.
Sauf que non. Lorsqu’elle se retrouva assise sur le siège passager, elle réalisa qu’elle avait les mains vide.

« Oh non ! »

Oubliant les dernières recommandations du sorcier, elle disparut de nouveau pour réapparaitre dans la voiture. Le colis était resté là, à sa place. Elle le reprit entre les mains et fit une nouvelle tentative, se téléportant juste à l’extérieur du véhicule. Une fois encore, le colis n’avait pas suivi. Bon, visiblement l’objet ne se téléportait pas. Il allait falloir qu’elle trouve une autre solution.

Elle retourna dans le véhicule. Elle allait faire ça à l’ancienne. Elle tourna la manivelle sur la portière, baissant la vitre, puis fit passer le carton par la fenêtre. Elle se téléporta à son tour à l’extérieur et le récupéra. Il ne lui restait plus qu’à repartir à pieds jusqu’à la voiture d’Elkan.

Sauf que c’est évidemment à cet instant précis qu’elle entendit des éclats de voix et aperçut des silhouettes qu’elle reconnaissait parfaitement et qui se dirigeaient vers la voiture. Elle se baissa immédiatement, en espérant qu’ils ne l’aient pas vue. Pour le moment elle était cachée par le véhicule, mais ça n’allait pas durer. Elle ne pouvait pas se téléporter avec le colis. Et quelle que soit la direction dans laquelle elle partirait, ils la verraient à l’instant où elle sortirait de sa cachette. Autrement dit, elle était coincée.
 

Il y'a un compte à rebours au-dessus de leurs têtes. Il entend le tic tac incessant de cette foutue horloge, là, dans un coin de son crâne. Il est toutefois incapable de savoir combien temps il leur reste. C'est pourquoi la moindre seconde est précieuse. Ils doivent déguerpir d'ici et vite. Poussé par cette montée d'adrénaline et aidé par l'immensité de ses guibolles, le nécromancien engloutit rapidement la distance qui le sépare de son véhicule. Alors qu'il carbure à fond les ballons, ses pieds de viking foulant l'asphalte, il voit la fantôme apparaître dans l'auto. Parfait, qu'il se dit, à deux secondes seulement d'arriver près de la voiture. Le soulagement se gonfle dans sa poitrine pour se dégonfler comme un soufflet l'instant d'après. Lancé en pleine vitesse, il ne parvient pas à se stopper net et c'est avec violence qu'il percute la bécane.

— Coraline, est la première chose qu'il souffle malgré sa respiration manquante.

Incrédule, il ouvre la portière et y passe sa tête. Ses claires prunelles sondent l'habitacle mais rien. Ni fantôme. Ni colis. Il respire fort, cherchant à ingurgiter le plus d'oxygène possible. Ses jambes brûlent autant que son œsophage.

— CORALINE!

Il beugle, essoufflé et en colère. La consigne était claire pourtant! Il inspire, expire,  frappe le toit de sa voiture avant d'hurler de plus belle. Putain! Sa main! Alors il se redresse pleinement et frappe la roue avant. Mauvais plan. Cette fois c'est le pied qu'il s'endommage.

— PUTAIN!

Et ça grogne. Et ça serre des dents. Rien ne se déroule comme prévu. Elkan déteste les imprévus. Il décide d'attendre quelques secondes. Encore du temps qu'il n'a pas, d'ailleurs. Elle va bien finir par réapparaître, non? Impatient, nerveux, le nécromancien bat l'asphalte du bout de ses mocassins. A tout hasard il regarde à nouveau à l'intérieur de la voiture. Toujours pas de Coraline.

— Merde, qu'il crache.

Le blondinet passe sa main valide dans ses cheveux gominés et monte à l'intérieur de son auto. Il démarre l'engin et conduit doucement jusqu'à l'endroit où est supposé se trouver Coraline. En approchant qu'est-ce qu'il voit? Les colosses qui s'en sont pris à eux. Le sorcier freine et met sa ceinture de sécurité. La simple présence d'une voiture attire l'attention, certes, mais le sorcier pousse le vice en klaxonnant. Les colosses se tournent en direction d'Elkan. Parfait. Ils ne sont pas humains. Ils ne sont pas humains, qu'il se répète en appuyant soudainement sur le champignon. Déterminé, le géant blond fonce droit sur eux. Certains ont le réflexe de se jeter sur le côté mais l'un d'entre eux se laisse bêtement percuté de plein fouet. Le corps bondit et rebondit sur le toit pour se casser la gueule sur le capot arrière. A nouveau il freine. Le corps en question est projeté sur l'asphalte.

Il ne sait pas où se trouve Coraline mais il ouvre la porte côté passager et hurle.

— CORALINE! DÉPÊCHE DE MONTER DANS CETTE VOITURE. TOUT DE SUITE!

Il a presque envie de rajouter : avec ou sans ce putain de colis! Il en a plein le cul, là. D'un autre côté, si elle se pointe sans le colis en question, il risque aussi de péter une durite.

Cachée derrière la voiture, le carton précieusement serré contre elle, Coraline était en train de se demander comment elle allait pouvoir s’en sortir. Elle pouvait les entendre qui approchaient de la voiture. Si elle sortait de l’autre côté pour rejoindre la voiture d’Elkan, ils la verraient immédiatement et sans son pouvoir de téléportation ils n’auraient aucun mal à la rattraper, et tout ça n’aurait servi à rien. Elle essayait de regarder un peu partout, de trouver une échappatoire, mais rien ne lui venait. C’est alors que soudain, la chance lui sourit puisque toute la bande se mit en même temps à regarder dans une direction. Elle en profita pour passer vers l’avant de la voiture et regarda de nouveau vers eux, à la recherche du bon moment pour s’élancer et tâcher de rejoindre la voiture du sorcier.

Mais c’était bel et bien lui qui volait à son secours, klaxonnant comme un dément et en fonçant direct dans le tas. Elle ne put s’empêcher de sourire, malgré la situation. Pour lui qui jouait toujours les propres sur lui à ne vouloir à aucun prix froisser ses costumes, c’était plutôt inhabituel de le voir renverser un démon.

C’est alors qu’il ouvrit la portière et lui hurla de monter. Serrant la boite contre elle, elle s’élança, courant aussi rapidement qu’elle le pouvait. Au moment où elle s’apprêtait à grimper dans la voiture, elle sentit une pression autour de sa cheville la tirer vers l’arrière. Elle eut le réflexe de s’accrocher à la portière de sa main libre.

« Si tu crois qu’on va te laisser partir ! »

L’un des démons qui s’étaient jetés à terre avait réussi à ramper jusqu’à elle. Et pourtant, par une impulsion qui lui arriva d’elle ne savait où, elle frappa la tête du type de son autre pied, le plus fort possible. Assommé, il la lâcha et elle put monter dans la voiture et fermer la portière.

« Je l’ai ! » Elle brandissait la boite avec fierté. « FONCE ! »

Elle avait beau être morte, elle avait quand même l’impression d’être essoufflée. Même si c‘était en soi impossible. Ils l’avaient échappé belle, c’était le moins qu’on puisse dire. Elle espérait seulement que ça en valait la peine.